Il était une fois une fort jolie demoiselle. Je dis qu’elle était jolie parce que dans les contes, les héroïnes sont toujours belles… Née sous les meilleurs auspices, elle fut un jour enlevée par l’insatiable Zeus, qui se fit la malle sous la forme d’un taureau blanc pour échapper à Junon, sa mégère à peine apprivoisée. Bien entendu, l’oie blanche n’y vit que du feu et tomba entre les fourches caudines du rusé maître de l’univers qui, ni une ni deux, lui fit trois enfants sur le champ. Puis, rassasié et peu enclin à acquérir l’usage des couches-culottes, celui-ci offrit sa belle de passage au roi de Crête. Tel est le destin d’Europa qui revient sur le devant de l’actualité ces jours-ci.
On peut s’amuser à faire un parallèle entre les aventures de notre déesse et celle qui va nous inciter à revoir notre bureau de vote d’ici peu. Des fées bienveillantes qui se penchent sur son berceau. Robert Schuman, Jean Monnet, entre autres, pour que les conflits intestins et sanglants soient à jamais éradiqués. Très vite, le Marché qui lui fait les yeux doux. Une descendance nombreuse et pas vraiment maîtrisée et pour finir, un traité de libre-échange transatlantique qui fait peur à pas mal de monde. Bon, on a bien ricané mais au final, on ricane jaune. Il en est d’ailleurs ainsi pour tout ce dont on perçoit l’impérieuse nécessité mais qui prend à un moment donné des chemins qui ne disent rien qui vaillent. Elle aujourd’hui comme la langue d’Esope, la meilleure et la pire des choses. La meilleure, car n’oublions pas que c’est en partie grâce à elle que Grèce, Espagne et Portugal ont pu renforcer leur économie au sortir de dictatures qui les avaient laissés exsangues. La pire, car son absence de pouvoir politique a empêché une intervention efficace dans le conflit qui a embrasé les Balkans dans les années 90 et lui ôte le poids dont elle devrait pouvoir peser, en Ukraine et ailleurs.
On résume ? Les anti et les pro Européens vont se battre comme des chiffonniers jusqu’au dimanche 25 pour une fiancée dont les atours ont été pervertis très vite après sa conception. Organisme Génétiquement Modifié, ce « machin » pour paraphraser De Gaulle lorsqu’il causait l’ONU, ne pourra continuer en l’état au risque d’imploser. Alors ? Soit l’Europe change et devient un véritable Etat continent sur un modèle états-unien, soit elle ne sera plus qu’une zone de libre-échange dont, à terme, un des membres lassé des politiques d’austérité qu’elle lui impose claquera la porte et provoquera un inéluctable effondrement. A ceux que nous allons élire de prendre leurs responsablilités et d’assumer les conséquences de leurs choix.
Pierre de Nodrest – 22 mai 2014